Othman Nasrou : « Quand on est de droite, on ne peut pas voter contre cette réforme »
Le premier secrétaire général délégué des Républicains « appelle tous les députés LR à choisir la cohérence, le courage et la responsabilité ».
Quels enseignements tirez-vous de l’adoption au Sénat, où les LR sont majoritaires, de la réforme des retraites ?
Il faut rendre hommage au courage des sénateurs de droite qui ont tenu bon face à l’obstruction et à la démagogie de la gauche, sans jamais céder à la facilité. Les sénateurs LR, sous la direction de Gérard Larcher et de Bruno Retailleau, ont apporté des modifications utiles à la réforme. Le texte qui a été voté est donc devenu le texte de la droite. C’est notre réforme. La surcote pour les mères de famille a montré notre attachement à la politique familiale. Nous avons fait en sorte de mieux lutter contre la fraude, tout comme nous avons mis en place, contre l’avis du gouvernement, un « CDI Seniors », bien plus efficace et plus incitatif que l’usine à gaz de l’« index seniors »… Le seul regret que nous pouvons avoir, c’est de ne pas aller plus vite vers la fin des régimes spéciaux. La version du texte qui sera adoptée par la CMP (commission mixte paritaire) doit être la plus proche possible de celle qui a été approuvée par les sénateurs. Les aménagements ne peuvent être que mineurs et doivent conserver l’équilibre budgétaire de la réforme.
« Ce texte est devenu celui de la droite », dites-vous. C’est un message aux députés LR, très divisés sur le vote de cette réforme ?
Quand on est de droite, on ne peut pas voter contre cette réforme. Ce texte comprend désormais beaucoup de ce que nous avons toujours défendu. On y retrouve nos convictions et nos propositions. Il va dans le sens de l’intérêt du pays. J’appelle donc tous les députés LR à choisir la cohérence, le courage et la responsabilité.
Comment expliquez-vous alors qu’autant de députés LR soient contre ?
Je pense qu’il y a eu une aventure individuelle qui a brouillé le message, jeté le doute sur le contenu de cette réforme et renié ce que nous avions toujours défendu jusqu’alors. J’ai été très surpris d’entendre des députés LR expliquer que l’équilibre financier de cette réforme n’était pas important. Certaines améliorations au profit des carrières longues étaient probablement nécessaires, mais cela ne peut pas se faire au détriment de l’ensemble de l’équilibre financier du régime des retraites. A quoi bon faire une réforme si elle ne dégage aucune marge de manœuvre pour combler les déficits, alors que c’est sa raison d’être ? Nier cette nécessité, c’est tomber dans la même démagogie que la Nupes ou le RN, celle de l’argent magique qu’il suffit de trouver ailleurs. L’argent des pensions de nos retraités ne pousse pas sur les arbres. Je pense que la grande majorité des députés LR est au contraire sur une ligne de responsabilité et de réalisme.
Vous visez explicitement Aurélien Pradié. Y a-t-il un problème Pradié au sein des Républicains ?
Il a été réglé par la décision d’Eric Ciotti de le sortir de l’équipe dirigeante des Républicains. J’aurais été très surpris de voir la semaine dernière le numéro 2 des Républicains aux côtés d’un dirigeant syndical, en osmose, en pleine manifestation contre la réforme des retraites. Le débat public est déjà suffisamment soumis au diktat de la gauche pour que la droite n’y succombe pas à son tour. Je ne crois pas à l’avenir d’une droite CGT. Je la combattrai.
Est-ce que cette séquence n’aura pas brouillé un peu plus la ligne économique de LR ?
Incontestablement, au terme de cette séquence, nous aurons besoin d’une clarification. Au sein des Républicains, il existe une ligne majoritaire : c’est celle de la lutte contre tous les déficits et qui assume pour cela des réformes structurelles ambitieuses. Et cela, pour une raison simple : le déficit, c’est toujours l’appauvrissement du pays. Cette ligne n’a pas été suffisamment entendue ces derniers mois, à cause des messages contraires qui ont été envoyés par certains. Eric Ciotti a raison de vouloir organiser des « états généraux » pour faire cette clarification.
Afin que les choses soient plus claires et stabilisées, Les Républicains ne doivent-ils pas se poser de nouveau la question d’un accord de gouvernement avec l’exécutif ?
Cette question a été clairement tranchée par nos élections internes. Notre projet est connu. Il est sur la table. C’est notamment celui qui avait été défendu lors des deux dernières élections présidentielles, courageusement, par François Fillon et Valérie Pécresse. Si le gouvernement choisit de reprendre des réformes qui y figurent, nous les voterons en responsabilité. C’est particulièrement le cas quand nous avons la capacité de réécrire les textes du gouvernement. Si nous pouvons œuvrer dans l’intérêt du pays sans nous renier, pourquoi nous en priver ? Il n’y a pas d’accord à avoir avec le gouvernement, il nous suffit de rester en accord avec nos convictions.
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