Olivier Marleix : « Si le gouvernement ne fait pas l’effort d’écouter LR, il va à l’échec »
Après l’adoption de la motion de rejet de la loi immigration, le président du groupe Les Républicains à l’Assemblée nationale rappelle qu’Emmanuel Macron « ne peut gouverner comme s’il avait une majorité absolue ».
Quelles conclusions tirez-vous de l’adoption de la motion de rejet au Parlement ?
Personne ne peut être surpris par ce vote. Nous avons atteint les limites du «en même temps». Sur l’immigration, ce n’est pas tenable. M. Darmanin ne pouvait pas construire un texte de droite avec la majorité sénatoriale et s’appuyer sur la gauche à l’Assemblée pour le déconstruire. Cela fait un an et demi que j’échange avec la première ministre. Nous essayons de trouver des voies de passage mais j’avais prévenu Élisabeth Borne dès le début: sur l’immigration, nous refuserions les petits compromis.
Est-ce une « gifle » pour le ministre de l’Intérieur ?
M. Darmanin et l’exécutif doivent enfin comprendre que dans cette Assemblée où il n’y a pas de majorité, rien ne peut se faire sans un minimum de respect et d’écoute des oppositions. Sur l’immigration, il n’est pas question de voter un texte qui aggrave la situation de la France. En 2022, on a accueilli 500 000 étrangers, un record absolu. Sous le quinquennat d’Emmanuel Macron, la France aura accueilli deux fois plus d’étrangers, en moyenne annuelle, que sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy. Et le nombre d’étrangers légaux aura doublé en dix ans ! Son bilan devrait l’obliger à un peu d’humilité et d’écoute.
Pourquoi Gérald Darmanin a-t-il échoué, selon vous ?
Il a eu une drôle de méthode. On ne peut pas chercher à s’attacher les bonnes grâces des députés individuellement et les insulter collectivement. Mais au-delà, il paie l’ambiguïté de ce texte : on ne peut pas prétendre réduire l’immigration et commencer par faire des régularisations massives comme le proposait l’article 3. Le « droit à la régularisation » des sans-papiers n’est pas acceptable, il aurait des conséquences massives. 40 % des 900 000 clandestins remplissent d’ores et déjà la condition de trois années de résidence, ça veut dire 360 000 personnes ! Cette disposition est un copier-coller d’une mesure du gouvernement socialiste espagnol de Pedro Sanchez, qui est loin d’être ma référence.
On vous a accusé d’une « détestation » personnelle de Gérald Darmanin…
Mes sentiments importent peu. Tout ce que je fais depuis dix-huit mois prouve que mon seul critère, c’est l’intérêt du pays.
L’avenir du projet de loi sera décidé au sein d’une commission mixte paritaire (CMP). Ce chemin législatif vous satisfait-il ?
Il donne un immense avantage à la droite. Au sein de la CMP, les sept sénateurs et sept députés vont examiner la version sénatoriale du texte. Si les sénateurs n’obtiennent pas ce qu’ils veulent, le gouvernement sera obligé de partir sur le texte du Sénat. Nous sommes donc en position de force pour négocier.
Demandez-vous la dissolution de l’Assemblée, comme le réclame Jordan Bardella au RN ?
Cela regarde M. Macron. Mais je vois mal le président dissoudre en disant aux Français : « Donnez-moi une majorité pour contrôler l’immigration… » Il en aurait une, mais peut être pas celle attendue !
Que dit ce vote sur l’état de votre groupe parlementaire, aujourd’hui ?
Nous avons joué collectif. Ce vote montre que si le gouvernement ne fait pas l’effort d’écouter les députés LR, il va à l’échec. Mais les accords ne se font pas à n’importe quel prix. Certains redécouvrent peut-être qu’on n’est pas là pour faire plaisir à la majorité, le petit doigt sur la couture du pantalon, mais pour servir notre pays et nos convictions. Notre boussole, c’est le redressement du pays : depuis dix-huit mois, nous avons voté, après les avoir modifiés, les textes qui nous semblaient aller dans le sens de l’intérêt du pays : la réforme des retraites, l’assurance-chômage, réforme du RSA… C’est au nom de ce même besoin de sursaut que nous nous opposons au laxisme en matière migratoire. L’enjeu, c’est la cohésion nationale.
Que dites-vous à Emmanuel Macron après ce premier échec de la macronie ?
La même chose depuis juin 2022 : la composition de l’Assemblée nationale oblige au respect et à l’écoute. Le président ne peut gouverner comme s’il avait une majorité absolue. Le compromis, ce n’est pas l’oukase ou la menace.
Avez-vous échangé avec le ministre de l’Intérieur depuis le vote de la motion de rejet ?
J’ai eu la première ministre, Élisabeth Borne, à qui j’ai réaffirmé nos lignes rouges, notamment ce fameux « droit à régularisation ». Elle doit dire à sa majorité de sortir du en même temps si elle veut qu’un accord soit trouvé avec les Républicains à l’Assemblée et au Sénat.
>> Lire l’interview sur LeFigaro.fr
L’article Olivier Marleix : « Si le gouvernement ne fait pas l’effort d’écouter LR, il va à l’échec » est apparu en premier sur les Républicains.