Olivier Marleix : « La motion de censure n’est ni un totem ni un tabou »
À l’ouverture des journées parlementaires qui débutent mardi à Saint-Malo (Ille-et-Vilaine), Olivier Marleix, président du groupe les Républicains à l’Assemblée nationale, expose au Figaro les ambitions de la droite.
Quel message voulez-vous adresser aux députés LR en cette rentrée ?
Les Français regardent ce qui se passe à l’Assemblée nationale. À travers nos propositions, nos votes, nous avons l’occasion de leur redire ce que nous sommes. Mais pour être audibles, nous devons jouer collectifs. Nous serons au grand complet à Saint-Malo, c’est un vrai signal.
Sous quel thème placez-vous ces journées ?
Le thème central, c’est l’unité nationale. Jamais notre pays n’a été aussi fracturé : Emmanuel Macron a joué de ces fractures pour pousser les Français dans les bras de Mélenchon ou de Le Pen et se poser en garant de l’ordre. Nous n’avons jamais connu de crises aussi profondes que celles des « gilets jaunes », des retraites et des violences urbaines. Pour tous ceux qui sont attachés à l’unité du pays, c’est insupportable. Je suis persuadé que les Français, au fond, souffrent de ce climat. L’unité nationale, elle se reconstruit en réglant la question de l’immigration, en affirmant, quelles que soient nos origines, notre volonté « de faire de grandes choses ensemble », comme disait Renan, mais aussi en portant une autre vision de l’économie, au service de tous. Ce n’est pas un hasard si j’ai invité Henri Guaino, l’homme de la fracture sociale en 1995,comme grand témoin.
Votre groupe sera-t-il plus soudé sur les textes budgétaires et le projet de loi sur l’immigration qu’il ne le fut sur les retraites ?
Les retraites ont été un cas à part. Nos divisions ont masqué nos victoires. Mais sur les vingt textes de loi adoptés depuis un an, il n’y a jamais eu plus de quatre ou cinq votes divergents au sein du groupe ! Je comprends que le président de la République et sa majorité se plaisent à diffuser une petite musique pour laisser à penser que nos divisions seraient la source de tous les maux. C’est juste faux.
Ne craignez-vous pas de nouvelles divergences chez vous, notamment sur l’immigration ?
Nous sommes unis et déterminés. Sur l’immigration, les Français ne supporteraient pas qu’on fasse semblant. Ce serait ouvrir un boulevard à Mme Le Pen. C’est la raison pour laquelle j’ai très clairement dit et répété depuis un an à Mme Borne que nous déposerions une motion de censure sur un texte laxiste en la matière. J’ai visiblement été entendu sinon ils n’auraient pas reculé huit fois. Aujourd’hui, je le redis.
Êtes-vous prêt à déclencher une motion de censure sur le budget ?
La motion de censure ce n’est ni un totem de virilité, ni un tabou. Il y a une grande hypocrisie chez Mme Le Pen quand elle assure ne pas vouloir bloquer les institutions tout en votant de façon pavlovienne dix motions de censure en un an, bras dessus, bras dessous avec LFI. Chez LR, nous sommes cohérents et responsables. Mais sur le budget, nous aurons des combats. Je pense au prix des énergies : l’essence à 2 euros, c’est insupportable pour les Français déjà lourdement impactés par l’inflation, de même que la suppression du tarif réglementé du gaz qui va exposer des millions de Français à la spéculation, et la réforme du marché européen de l’électricité. Nos PME ne peuvent pas revivre le cauchemar de l’année dernière.
Que répondez-vous à Bruno Le Maire qui vous appelle à être responsables sur la loi de programmation des finances publiques ?
En dix ans de pilotage des finances publiques par M. Macron, la France a pris 1000 milliards de dettes. Tous les pays de l’UE ont profité des taux négatifs pour se désendetter, sauf nous. Tous les pays de l’UE auront un déficit public sous les 3% de PIB d’ici à 2025, sauf nous ! Fin 2011, la dette par habitant représentait 26000 euros, nous sommes à 43000 euros aujourd’hui. En France, un couple avec deux enfants a sur sa tête 173000 euros de dette publique à rembourser ! C’est cela, le bilan de M. Macron. Il est hors de question de lui donner quelque quitus que ce soit.
La présence des députés LR Vincendet et Duby-Muller à côté de Darmanin le jour de la rentrée des LR a suscité des critiques. Qu’en pensez-vous ?
On pourrait parler de faute de goût, mais je crois surtout que cela n’intéresse personne !
Le ministre de l’Intérieur n’a-t-il pas été soutenu par Nicolas Sarkozy ?
Je crois qu’en ouvrant la succession de M. Macron quatre ans avant la fin de son mandat, Nicolas Sarkozy a surtout fait preuve de malice envers le président de la République. Peut-être qu’il commence à comprendre qu’Emmanuel Macron l’écoute mais ne l’entend jamais.
La droite s’inquiète d’une situation parlementaire qui, si rien ne change, rendrait le pays ingouvernable. Quelle est la solution ?
Le plus simple est de légiférer moins et d’agir mieux. Les Français attendent des résultats sur le pouvoir d’achat, le logement, la sécurité, l’environnement, des actes, pas de grands-messes. Prenez l’immigration : en 2012, la droite exécutait 22% des OQTF, on est tombé à 7% en 2022. La loi est pourtant la même, elle est juste appliquée plus mollement. Et quand le besoin de légiférer s’impose vraiment, il faut d’abord savoir écouter. J’observe que, depuis un an, l’Assemblée nationale a adopté cinq lois avec des majorités de plus de 400 députés ! Si Emmanuel Macron soumet une révision de la Constitution au référendum, comme nous le lui demandons, pour proposer que la France retrouve sa souveraineté en matière de politique migratoire, je pense qu’il obtiendra un « oui » à 80%. Je l’invite à ne pas s’en priver !
Quel scénario de la recomposition de la droite vous semble-t-il le plus prévisible, en vue de la présidentielle ?
Dans un an, après les JO, nous serons à mi-mandat et les Français auront deux ans pour réfléchir au destin de notre pays. Ce ne sera pas du luxe après les campagnes escamotées de 2017 et 2022. Ce qui comptera, ce sera le projet, pas les petites personnes. Les sujets que nous mettons sur la table à Saint-Malo sont fondamentaux : la question existentielle de l’immigration, notre vision d’une économie plus juste et le redressement financier du pays pour redonner de la liberté et du pouvoir d’achat aux Français. Bardella cite de Gaulle mais il oublie que le Général, c’est aussi le redressement financier d’une France au bord de la faillite. Ce n’est pas Mme Le Pen proposant de nous vautrer encore plus dans les dépenses sans travailler qui nous permettra de redresser le pays.
Et les candidats issus de l’actuelle majorité ?
Je crois qu’après quinze ans de Macron, les Français auront envie de changer de film. Ils auront le choix entre Mme Le Pen et un candidat venu de la droite capable de réconcilier les Français et de redresser le pays en prenant des mesures exigeantes et courageuses. Comme en 1958.
>> Lire l’interview sur LeFigaro.fr
L’article Olivier Marleix : « La motion de censure n’est ni un totem ni un tabou » est apparu en premier sur les Républicains.