Michèle Tabarot : « Inventer un avenir aux Républicains »
C’était le 5 juin 2024 – il y a moins de cinq mois. Éric Ciotti et Michèle Tabarot, tout sourire, posaient aux côtés de François-Xavier Bellamy qui achevait au Cannet sa campagne pour les Européennes. Une semaine plus tard, Ciotti s’alliait au Rassemblement national. Et le parti gaulliste vacillait.
Au cours de cette période, la députée maralpine s’est battue sur tous les fronts. Réélue en juillet au Palais-Bourbon, bombardée à la questure, elle s’est investie pour assurer la survie des Républicains. Aujourd’hui, elle est au cœur du réacteur. Décidée à redonner du souffle à la formation qui a donné quatre Présidents à la France.
Vous avez intégré, la semaine dernière, la direction collégiale intérimaire des Républicains. Quel est votre rôle ?
Avec Annie Genevard, François-Xavier Bellamy et Daniel Fasquelle, nous allons assurer le fonctionnement et l’animation du parti jusqu’aux élections internes qui nous permettront de choisir notre futur Président.
Le trésorier Daniel Fasquelle affirme que les finances de LR ne permettent pas d’organiser une élection dans l’immédiat. La situation est si grave que cela ?
Oui. Les finances du parti sont au plus mal. Depuis qu’Éric Ciotti a provoqué cette crise, la plupart des élus LR ont cessé de reverser au parti 5% de leurs indemnités. Ils ne voulaient pas prendre le risque d’alimenter la cagnotte d’un président qui nous a trahis ! Les militants, pour les mêmes raisons, n’ont pas renouvelé leur cotisation. Tout est à l’arrêt.
Quid des aides de l’État ?
Elles vont baisser, puisque nous sommes passés de 62 à 47 députés. Là encore, nos électeurs ont été trompés par Éric Ciotti qui revendiquait toujours la présidence de LR, alors même qu’il présentait des candidats contre les nôtres !
Daniel Fasquelle évaluait ce préjudice à 2 ou 3 millions d’euros. Les poursuites envisagées seront-elles finalement engagées ?
Non. Conformément à l’accord conclu fin septembre entre Éric Ciotti et Laurent Wauquiez, il n’y aura pas de suites.
Éric Ciotti revendique 10.000 adhérents pour son nouveau parti, l’Union des droites pour la République (UDR). Ce chiffre vous inquiète ?
Pas du tout. En dépit des nombreux courriers adressés à nos adhérents, très peu d’entre eux ont suivi Éric. Quant aux chiffres qu’il avance, lui seul peut savoir s’ils sont exacts.
Parmi les candidats possibles à la présidence du parti, le nom de Laurent Wauquiez revient avec insistance. Pourquoi ne se déclare-t-il pas ?
Il faut prendre les problèmes les uns après les autres. Laurent est engagé jusqu’au mois de janvier sur une réflexion sur la refondation du parti. Ensuite, la question de la présidence se posera mais pas avant.
On cite également les noms de Bruno Retailleau, Xavier Bertrand et David Lisnard. Ces hypothèses vous paraissent sérieuses ?
Dès qu’il y a une élection, tout est possible.
Vos relations avec le maire de Cannes, président de Nouvelle Énergie, se sont tendues avant les législatives. Où en êtes-vous aujourd’hui ?
On s’est rencontrés pour parler des difficultés que rencontre la Ville du Cannet pour obtenir ce qui lui est dû au sein de la Communauté d’agglomération Cannes Pays de Lérins. Pour le reste… Mon point de vue reste inchangé. On peut difficilement appartenir à deux partis politiques. Il faut qu’une position claire soit définie au niveau national.
Le groupe de la Droite républicaine (DR) est désormais inscrit au Palais-Bourbon comme faisant partie de la majorité avec les macronistes. N’est-ce pas la preuve de la collusion que dénonce Éric Ciotti ?
Bien sûr que non ! Nous avons un Premier ministre LR, qui a composé un gouvernement avec des ministres LR comme Bruno Retailleau, pour redresser le pays. C’est en responsabilité que nous avons décidé de le soutenir. Ce n’était pas la facilité.
Vous pensez que le « socle commun » peut tenir ?
J’en ai parlé avec Michel Barnier et avec le ministre de l’Intérieur, vendredi dernier, lors de leur visite à Menton. Ils ne savent pas combien de temps durera leur mission, mais ils assument leurs responsabilités. Le bloc central penche parfois à gauche, parfois à droite… Le soutien des Républicains est loyal ; ça durera tant que ça durera.
Le projet de budget prévoit 20 milliards d’euros de hausses d’impôts. Les Républicains peuvent soutenir une telle mesure sans rougir ?
On est dans une situation totalement inédite. Personne ne sait comment on est passé de 4% à 6% de déficit en un an. Le but, c’est d’éviter la faillite. Nous essayons de nous battre sur les sujets qui nous sont chers, notamment les retraites : nous ne voulons pas que l’indexation des pensions soit repoussée de six mois. Nous sommes aussi très préoccupés par l’impact de ces mesures sur les collectivités.
Dans les Alpes-Maritimes, vous assurez l’intérim d’Éric Ciotti à la tête de la fédération LR. Serez-vous candidate à la présidence ?
Les élections locales viendront après les élections nationales. Donc, nous avons le temps… Je ne suis pas encore fixée.
La situation des LR semble particulièrement confuse dans les Alpes-Maritimes. Éric Ciotti et ses partisans n’ont pas été exclus de la majorité au conseil départemental ; il reste président de la commission des finances. Vous le regrettez ?
Oui. Tôt ou tard, il faudra une clarification. Charles Ange Ginésy a retardé l’échéance, mais on ne peut pas critiquer Les Républicains à Paris et travailler main dans la main avec eux à Nice. Une scission au sein du groupe me paraît inéluctable avant les prochaines élections.
Pour l’instant, cette scission n’a pas eu lieu. N’est-ce pas la preuve qu’Éric Ciotti dispose du soutien d’une majorité de cadres et de militants ?
Je ne le pense pas. Mais il faudra, en effet, lever les ambiguïtés. Il n’est pas possible qu’un parlementaire comme Henri Leroy puisse soutenir Éric Ciotti et continuer à siéger au sein du groupe LR au Sénat. Il devra clarifier sa position.
Charles Ange Ginésy affirme n’avoir subi « aucune pression », exceptée du camp estrosiste. Vous le croyez ?
Je pense que les pressions ont été plus larges. Je ne sous-estime pas l’importance des liens humains. Mais l’amitié et la politique, ce sont deux choses différentes.
Pensez-vous qu’à terme, une alliance avec Christian Estrosi est possible localement ?
Pour le moment, Christian Estrosi est membre d’Horizons, un parti avec lequel nous n’avons pas d’accord. Il faudra voir comment la droite va se reconstruire, qui seront les candidats à la présidentielle… Ce qui se fera au niveau national aura forcément des répercussions locales.
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