Laurent Wauquiez : « Notre préférence ira à un premier ministre issu des LR »
Le chef de file de la droite à l’Assemblée plaide pour l’usage du référendum, notamment sur l’immigration, en cas de blocage au Parlement.
Quelles conditions la droite pose-t-elle pour soutenir le prochain gouvernement ?
Notre pays est dans une situation extrêmement grave et le devoir de la droite est de chercher des solutions pour éviter que la France ne plonge. La crise que nous connaissons a deux causes : d’abord la responsabilité du président de la République, qui a choisi de dissoudre l’Assemblée. Puis le couple Mélenchon-Le Pen, qui a choisi la censure. Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon ont fait le choix, ensemble, de priver la France d’un gouvernement, d’un budget et d’une stabilité. La droite refuse cette stratégie du chaos. Depuis cet été, je m’emploie à ce que notre famille parle à nouveau d’une même voix, et c’est ce qui nous a permis d’avoir des ministres au gouvernement. L’objectif est d’avoir un programme de gouvernement le plus à droite possible et de faire en sorte qu’il y ait une stabilité pour permettre aux ministres d’agir sur la durée. Il y a, pour cela, des conditions.
Lesquelles ?
Notre famille politique est unanime. Notre ligne rouge absolue est : ni LFI au gouvernement, ni le programme du Nouveau Front populaire. Il ne peut y avoir ni négociations, ni compromis là-dessus. En parallèle, il faut être responsable et discuter avec tous ceux qui refusent la logique du chaos. La responsabilité du futur premier ministre doit être de dialoguer immédiatement avec ceux qui ne veulent pas de la stratégie du pire, et de définir avec eux les conditions pour qu’il n’y ait pas de censure.
Accepteriez-vous, dans ces conditions, de participer à un gouvernement ?
Je ne suis pas guidé par cela et je l’ai montré. J’essaye, dans cette période, d’aider à trouver des solutions pour sortir de l’impasse.
Si le gouvernement futur ne répond pas à ces conditions, vous réservez-vous le droit de le censurer ?
Je ne crois pas qu’il faille céder à la facilité de la censure. Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon l’ont fait pour des raisons purement politiciennes. N’agitons pas de façon inconsidérée et irresponsable la menace d’une censure qui plongerait le pays dans l’instabilité.
LR pourrait-il accepter de travailler avec un premier ministre socialiste, sachant que certains d’entre eux se disent prêts à négocier avec la droite et la macronie ?
Je compte peser pour un programme de travail clairement à droite, et donc cette hypothèse n’est pas crédible à mes yeux.
Sébastien Lecornu, François Bayrou, Catherine Vautrin… Ces profils vous paraissent-ils adaptés ?
La politique française meurt d’une approche qui ne passe que par les castings. Depuis une semaine, on agite des noms, mais personne ne pose la question pour quoi faire ? La condition pour qu’un gouvernement marche, ce n’est pas « qui ? », mais « quoi ? ». Notre souhait, c’est que le prochain gouvernement ait un agenda de travail qui permette le redressement du pays. C’est pour cela qu’il va de soi que notre préférence ira évidemment à un premier ministre issu des LR. Mais il faut aussi tenir compte des leçons de ce qui vient de se passer : Michel Barnier, auquel je veux rendre hommage, a pâti de l’absence d’un agenda de travail défini dès le début. Ce que nous voulons mettre sur la table, et notre groupe de députés y a travaillé, c’est un programme de travail pour les six mois à venir, afin de répondre aux urgences du pays.
À savoir ?
Il y a d’abord l’urgence budgétaire : baisse de la dépense publique, pas de hausse d’impôts. La deuxième urgence est celle de la sécurité. Je l’ai dit au président de la République : je souhaite que Bruno Retailleau puisse continuer son action au ministère de l’Intérieur. Il faut une loi pour lutter contre le narcotrafic et une loi de tolérance zéro en matière judiciaire. La troisième urgence est la fermeté face au défi migratoire : l’arrêt de l’accès à notre système de protection sociale par des étrangers qui n’ont jamais cotisé – avec notamment la réforme de l’AME – et des reconduites à la frontière enfin efficaces. Quatrième urgence, l’urgence économique : il faut libérer l’économie française qui est en train d’étouffer sous l’excès de régulation, avec une grande loi de nettoyage nous débarrassant des agences administratives devenues des monstres à normes.
Ne faut-il pas reporter le sujet de l’immigration, mais aussi des retraites, à 2027, et miser sur un gouvernement de l’arc républicain, du PS à LR, centré sur l’urgence budgétaire ?
Je suis totalement contre le fait de perdre du temps. S’il y a un blocage au Parlement, sur des sujets pour lesquels une large majorité de Français est d’accord, alors, ayons recours à des référendums pour faire sauter les verrous. Pourquoi n’interrogeons-nous pas les Français dans cette période sur ce qu’ils veulent en matière d’école contre le wokisme, de sécurité, de rééquilibrage entre le travail et l’assistanat ?
Sur l’immigration, comment ces questions seraient-elles posées ?
Contrairement à ce que prétend la gauche, il y a un large consensus chez les Français sur l’immigration. On peut faire plusieurs référendums sur des projets de loi : souhaitez-vous conditionner l’accès des étrangers aux aides sociales à une durée minimum de cotisation de trois ans ? Souhaitez-vous réformer l’aide médicale d’État ? Souhaitez-vous supprimer les autorisations de séjour permettant de venir se faire soigner en France gratuitement ?
Si vous étiez premier ministre, quelle serait votre première décision ?
Le premier ministre devra d’abord faire adopter une loi d’urgence pour permettre juste à l’État de fonctionner. La facture de la censure est colossale et il va falloir assurer une continuité pour nos services publics, les entreprises… Par exemple, tout le plan de soutien à notre agriculture est remis en question par cette censure. Une fois cela fait, la priorité, à mes yeux, c’est la revalorisation du travail. On ne peut plus continuer à faire croire que le pouvoir d’achat se décrète à coups de chèques gouvernementaux et accepter que l’on gagne plus en restant chez soi au lieu de travailler. C’est tout le sens de mon combat politique : revaloriser le travail, lutter contre l’assistanat. Nous proposons qu’il y ait une aide sociale unique plafonnée à 75 % du smic.
Que pensez-vous de l’hypothèse d’une présidentielle anticipée, attendue par certains élus RN, LFI et même LR ?
Je ne suis pas pour ajouter de l’instabilité à l’instabilité et je ne pense pas que, dans la période actuelle, aller jusqu’au bout du chaos soit la bonne solution. Je partage la déception des Français face à la chute du gouvernement de Michel Barnier qui voulait et qui pouvait être utile au pays.
La censure votée par le RN a divisé les électeurs de droite. Est-il encore possible de les réunir ?
Je suis convaincu que c’est non seulement possible, mais indispensable, et c’est la responsabilité de la Droite républicaine. Elle doit parler à tous ceux qui, à cause des déceptions, divisions et absence de clarté, se sont détournés de la droite. Mais ils ouvrent aujourd’hui les yeux, découvrent une Marine Le Pen qui vote avec Jean-Luc Mélenchon, et les limites du « en même temps » sur les sujets de sécurité ou d’immigration. Face aux artisans du chaos, la droite doit offrir un chemin de responsabilité pour le redressement de la France : fermeté sur le régalien et revalorisation du travail. Si on fait cela, cette droite peut fédérer à nouveau.
En parallèle, Ursula von der Leyen a signé le traité sur le Mercosur . Qu’en déduisez-vous ?
C’est une nouvelle illustration de la facture de la censure. Ceux qui ont provoqué l’instabilité dans le pays ont affaibli la voix de la France à Bruxelles. Madame von der Leyen en a profité pour imposer le Mercosur malgré le « non » de la France. C’est inquiétant, et cela vaut aussi dans d’autres domaines : il y a des tentatives de la Commission pour ouvrir dans le domaine militaire la possibilité d’acheter du matériel américain avec des fonds européens. Il est temps de restaurer la voix de la France.
Que dit la restauration de Notre-Dame ?
Lorsque Notre-Dame a brûlé, j’avais dit que cet incendie nous avait rappelé l’évidence de notre héritage chrétien et l’importance de le défendre. La restauration de la cathédrale porte en miroir un message tout aussi fort. La France que l’on a envie d’aimer, de reconstruire, celle que le monde entier admire, elle est là : dans notre culture, dans notre civilisation, mais aussi dans cette France qui travaille, celle de ces artisans inouïs qui ont ressuscité ce symbole de l’âme française.
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