Eric Ciotti : « Je demande solennellement à Emmanuel Macron de nous recevoir »
Après avoir déposé avec Bruno Retailleau et Olivier Marleix deux propositions de loi, dont l’une vise à réformer la Constitution, Éric Ciotti presse le chef de l’État d’organiser un référendum.
Le président des Républicains estime que la discussion sur l’immigration doit s’engager avec le gouvernement sur la base des textes LR. « Une condition » non négociable selon Éric Ciotti. Au risque de tout bloquer ?
LR presse le gouvernement d’agir sur l’immigration. Arriverez-vous à trouver un accord avec l’exécutif ?
Plus que jamais, et l’actualité tragique d’Annecy l’a encore démontré, nous avons besoin de rompre avec l’immobilisme en matière d’immigration. Le chaos migratoire nous menace. Or, le texte proposé par Gérald Darmanin, c’est du « en même temps » ! La discussion doit s’engager sur la base de nos propositions. C’est une condition claire. Le ministre de l’Intérieur a demandé à nous voir. Nous le verrons par courtoisie. Mais c’est à l’Élysée que ça se décidera, c’est le président de la République qui a les clés et lui seul. Je l’appelle à dépasser les tabous. Avec Bruno Retailleau et Olivier Marleix, nous lui avons écrit le 23 mai et nous étonnons de ne pas avoir eu de réponse. Je demande solennellement à Emmanuel Macron de nous recevoir pour le convaincre d’engager cette réforme. Nous ne nous laisserons pas embobiner dans un énième scénario à l’eau tiède.
Après Annecy, assumez-vous de dire aux Français : « C’est tout ou rien », alors que le gouvernement vous tend la main et que les LR disent qu’il y a urgence ?
C’est une fausse main tendue. Il n’y a pas de fermeté dans la poignée de main. Les Français en ont assez des discours politiques non suivis de faits. Si nos propositions sont adoptées, nous résoudrons le problème de l’immigration dans notre pays.
Qu’attendez-vous de plus d’Emmanuel Macron ?
Nous sommes entravés par un cadre supranational européen et par une jurisprudence nationale qui reprend tous les poncifs de la gauche. C’est pour cela que nous proposons une réforme de la Constitution qui permette de dépasser certains obstacles conventionnels, constitutionnels ou jurisprudentiels quand « les intérêts fondamentaux de la nation » sont en jeu. Si cette proposition des Républicains était soumise aux Français par référendum, elle recueillerait une immense majorité. Aujourd’hui, seul le président peut convoquer ce référendum.
Édouard Philippe, populaire à droite, est souvent proche de vos propositions. Pouvez-vous refuser de travailler avec lui ?
Il est dans la majorité, nous sommes dans l’opposition. Lorsqu’il était à Matignon, il a souvent porté des politiques aux conséquences négatives en matière de sécurité, d’immigration, d’accroissement des dépenses publiques et des prélèvements obligatoires. Je ne vois pas sur quelle base nous travaillerions avec lui. Je relève son double discours. Les propos qu’il tient sur l’AME (aide médicale de l’État), pourquoi ne les a-t-i l pas mis en oeuvre quand il était Premier ministre ? Pourquoi ses députés s’y sont opposés cette semaine à l’Assemblée ? Sur le sujet spécifique de l’Algérie, nous venons de déposer une proposition de résolution pour dénoncer les accords de 1968. Je dis aux 29 députés Horizons comme à ceux de la majorité avec une sensibilité de droite de nous suivre. Passons aux actes !
Selon lui, vos propositions reviendraient à un « Frexit juridique » ?
C’est l’argument fallacieux des apôtres de l’immobilisme. Il est politiquement inepte et juridiquement non pertinent. Nous voulons défendre l’identité constitutionnelle, telle que la cour de Karlsruhe le fait en Allemagne dans une décision de 2020. Personne n’accuse les Allemands de « Deutsch-exit » ! Notre texte est profondément démocratique et n’a rien d’anti-européen. Au contraire, il permettra de sauver l’Europe. Lorsqu’on n’écoute pas les peuples, ils se révoltent.
Reprendrez-vous d’autres initiatives avec le Sénat ?
Oui, nous le reproduirons notamment au plan économique à l’automne. Nous devons être le parti de la baisse des impôts et des charges. J’ai par ailleurs installé un compteur des dépenses publiques. Chacun des déplacements d’Emmanuel Macron donne lieu à des dépenses supplémentaires. Depuis le 30 mars, le compteur s’élève à 5,3 milliards d’euros ! Bruno Le Maire, nous dit que la situation budgétaire est périlleuse. Il faudrait qu’il en informe le président !
Vous lancez, samedi, les états généraux de la droite. Quel est l’objectif ?
L’objectif est de redresser une France qui sombre en redonnant de la crédibilité à la droite républicaine, en la refondant totalement autour de valeurs et d’idées fortes. Jamais les valeurs de droite n’ont été aussi soutenues en France et en Europe, mais malheureusement, chez nous, elles ne sont pas au pouvoir. Il faut donc faire un état des lieux lucide de nos forces mais aussi de nos faiblesses.
Pourquoi réussiriez-vous là où vos prédécesseurs ont échoué ?
Les dernières idées neuves datent de 2007 et nous n’avons rien gagné depuis. L’enjeu est là : soit nous y arrivons, soit nous disparaissons. Nous avons montré avec nos propositions sur l’immigration que nous avons la capacité à sortir de la bien-pensance qui a trop longtemps paralysé l’action publique et qui, il faut bien le reconnaître, a aussi touché notre famille politique.
Mais l’élection à LR n’a-t-elle pas tranché la ligne ?
C’est cette ligne qui peut nous faire gagner : l’autorité pour mieux protéger les Français, l’identité pour préserver et transmettre notre civilisation, et la liberté pour débloquer un pays englué dans la fiscalité et les normes. Nous allons tout mettre à plat, sans tabou. Un congrès conclura les états généraux début 2024.
Vous avez été élu président de LR en annonçant vouloir acter vite la candidature de Laurent Wauquiez pour 2027. Où en êtes-vous ?
Je n’ai pas changé d’avis. La primaire, qui est associée à notre double défaite de 2017 et 2022, n’est pas le mode de sélection le plus approprié. Nous avons besoin d’une incarnation. Laurent Wauquiez est le mieux armé pour cela. Les difficultés que nous avons traversées, comme lors du débat sur les retraites, m’ont conduit à inverser le dispositif et à travailler d’abord sur les idées. Le chantier des statuts s’ouvrira à partir du second semestre 2023 et avant les européennes.
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