Christian Jacob : « On est soit LR, soit LREM. Cette ligne s’applique à tout le monde »
Avant les législatives, le président des Républicains affirme que son parti n’est soluble « ni dans le lepénisme ni dans le macronisme ».
Après la réunion de groupe lundi soir et le conseil stratégique mardi matin, comment gérez-vous les divergences actuelles au sein des Républicains ?
J’ai toujours été attentif au respect des différentes sensibilités de notre famille politique, c’est ce qui contribue à notre force. Mais quand il y a une ligne définie par l’immense majorité, elle doit être respectée par tous. Je réunirai le 7 mai prochain un conseil national élargi à nos amis centristes avec tous nos candidats. Ce sera le lancement officiel de notre campagne des législatives.
Les Républicains ont choisi de mener la campagne des législatives sous leurs couleurs mais certains plaident pour une majorité de projets avec les macronistes. Pourrez-vous éviter une implosion du parti quand on entend que 30 % des députés LR pourraient s’éloigner ?
C’est l’intox habituelle, menée par le triste M. Solère, l’homme aux quatorze mises en examen qui a son rond de serviette à l’Élysée. Nous faisons le choix de l’indépendance. Le vote de désespérance n’a jamais été aussi élevé en France. Il y a une voie entre le parti unique d’Emmanuel Macron et les extrêmes, que seuls Les Républicains et leurs alliés centristes pourront incarner. Si la défaite aux élections locales a été aussi cinglante pour LREM et le RN, c’est parce que ces deux partis n’incarnent pas les territoires. La plus-value des Républicains, au-delà du projet législatif que nous allons porter, c’est cette proximité et cet ancrage territorial que nous incarnerons aux législatives. Le parti unique, c’est être inféodé à la seule personne du président de la République, noyé dans une majorité où l’on trouvera tout et son contraire. Aller vers le parti de M. Zemmour, c’est l’alignement de fait derrière Marine Le Pen. Ce qui est bien évidemment totalement exclu.
Visiblement, Nicolas Sarkozy ne voit pas ce danger du «parti unique». Pourquoi cette différence d’approche avec Les Républicains ?
Nicolas Sarkozy s’était uniquement exprimé dans le cadre du second tour. J’ai un immense respect pour lui et la manière dont il a conduit la France pendant son quinquennat. Je sais qu’il est préoccupé par la situation de notre pays et attaché à sa famille de cœur, qu’il a présidée. Notre position aujourd’hui a été adoptée à 87 % par les membres de notre bureau politique. Nous sommes tournés vers les législatives, sans être fongibles ni dans le lepénisme ni dans le macronisme.
Que pensez-vous des premières projections du rapport de force à l’Assemblée, annonçant un affaissement du groupe LR, qui pourrait se retrouver avec entre 36 à 65 élus ?
Avant les municipales, les départementales et les régionales, on nous expliquait également qu’on allait être laminés et cela n’a pas été le cas. Nos élus sortants ont été très présents sur le terrain pendant cinq ans, contrairement aux députés de la majorité présidentielle. En 2017, ils avaient été élus dans des conditions où Emmanuel Macron faisait rêver mais, désormais, tout le monde connaît les failles du président de la République et son incapacité à porter quelque réforme que ce soit. Nous aurons aussi des situations de reconquête et je suis persuadé que Les Républicains peuvent rester la première force d’opposition à l’Assemblée nationale.
Comment comptez-vous mener cette nouvelle bataille ?
Nous avons besoin de tout le monde, et tout le monde prendra sa place dans cette campagne: Laurent Wauquiez, Xavier Bertrand et tous les cadres de notre famille politique… Nous allons travailler en équipe. Les Français sont conscients qu’il ne faut pas confier tous les pouvoirs à Emmanuel Macron. Parallèlement, ce ne sont pas les candidats issus des appareils politiques de l’extrême droite ou de l’extrême gauche qui seront en capacité de représenter les territoires. C’est pour cela que je suis convaincu que le discours de responsabilité que nous portons sera entendu.
Pourtant, certains députés n’excluent pas de pouvoir travailler avec la majorité présidentielle…
Aujourd’hui, à ma connaissance, deux députés ont fait le choix de partir: Éric Woerth et Guillaume Peltier. Il est normal que certains réfléchissent, mais les choses sont claires: on est soit Républicain, soit majorité présidentielle. La double appartenance n’existe pas. Le président de la République n’a pas changé et ne changera pas. Il a fait la démonstration pendant cinq ans de son fonctionnement autocratique et solitaire, avec une majorité soumise, sans implantation territoriale et éloignée des préoccupations des Français. Son «en même temps» s’est traduit par du laxisme en matière de sécurité, d’immigration et de dépense publique et par une augmentation inquiétante de la pauvreté avec une fracturation sans précédent de notre pays. C’est le bilan du tandem Macron-Philippe.
Ceux qui préconisent un rapprochement avec Macron estiment qu’une autre option serait suicidaire. Que leur répondez-vous ?
Je le répète: on est soit LR, soit LREM. Chacun fait son choix en responsabilité. Cette ligne s’applique à tout le monde. La France des territoires doit être représentée à l’Assemblée nationale. Les Républicains ne seront jamais dans le blocage du Parlement ou l’obstruction systématique. Les combinaisons partisanes et les débauchages insupportent les Français. Je crois à la reconnaissance de nos territoires de France et des 577 circonscriptions qui les représentent, où nous serons présents avec nos alliés UDI et Centristes. On gagne toujours en restant soi-même, en aimant son pays et en le défendant, pas sur des combines partisanes. Soyons nous-mêmes, c’est cela qui fait la différence.
Que dites-vous aux députés qui estiment que leur parti n’est plus en capacité d’imposer une ligne de conduite avec le score de 4,78 % au premier tour de la présidentielle ?
Quand les vents sont contraires, il faut être solides et se mettre en dynamique. C’est ce que nous allons faire avec notre projet pour les législatives. Les défaites locales des Marcheurs ont montré que les Français ne se reconnaissaient pas dans leur parisianisme.
Comment expliquez-vous l’échec cinglant de Valérie Pécresse ?
Il est encore un peu tôt pour avoir des analyses précises. Notre système de sélection avait porté notre candidate assez haut dans les sondages, mais, ensuite, nous n’avons pas réussi à desserrer les mâchoires de nos adversaires, dans un contexte particulier (Covid, guerre en Ukraine) où Emmanuel Macron n’a eu de cesse de choisir Marine Le Pen comme interlocutrice. Elle était la seule qui lui donnait l’assurance d’être réélu. Après les législatives, il y aura la nécessité d’avoir un débat interne. Aujourd’hui, la priorité absolue est de jouer collectif.
La refondation des Républicains n’est-elle pas incontournable ?
Nous aurons bien sûr ce débat après les législatives, mais je l’ai déjà dit: l’enjeu n’est pas dans les commentaires mais dans la mobilisation. À l’Assemblée, nous serons force de proposition, déterminés pour répondre aux attentes de nos compatriotes en matière de pouvoir d’achat, d’ordre et de lutte contre la précarité et les fractures de la société générées par la majorité parlementaire d’Emmanuel Macron. Et le soutien des Français aux élections législatives est indispensable pour faire entendre ce discours de responsabilité. Nous n’avons jamais été pour une chambre ingouvernable, contrairement à La France insoumise et au Rassemblement national.
Côté finances, êtes-vous inquiet pour le parti et pour Valérie Pécresse ?
La situation financière de notre parti était heureusement saine. Nous faisons remonter 35 % des ressources de nos fédérations qui avaient bénéficié d’une hausse des adhésions. Cela représente un peu plus de 1 million d’euros. Et nous serons en mesure d’apporter une aide financière à nos candidats pour leur campagne législative.
À l’Élysée, on réfléchit au profil du nouveau premier ministre. Craignez-vous l’apparition d’une nouvelle personnalité de droite à Matignon ?
C’est le choix personnel du président de la République, nous en prendrons acte. Nous voyons bien que les débauchages de 2017 n’ont pesé en rien sur le «en même temps» du président qui a conduit notre pays là où il en est, avec un vote de désespérance en direction des extrêmes qui n’a jamais été aussi important dans l’histoire de notre République.
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