Bruno Retailleau : « L’État ne parvient plus à protéger les Français »
Le président des sénateurs LR prévient : si les députés ne rétablissent pas le texte immigration dans la version du Sénat, il n’y aura pas d’accord.
Le Chef de la majorité au Sénat hausse le ton sur l’immigration et fustige un « ratage à tous les niveaux » après l’attentat de samedi, à Paris.
L’attentat islamiste de Paris a fait un mort. Faut-il que les Français s’habituent ?
Il y a pire que l’horreur, c’est l’accoutumance à l’horreur. À force de répétitions, ce risque existe. L’État ne parvient plus à protéger les Français. C’est pourtant sa raison d’être. C’est le grand échec de Macron, car les Français voient bien que l’État est incapable d’empêcher que nos rues se transforment en coupe-gorge.
Gérald Darmanin évoque un « ratage du suivi psychiatrique »…
La psychiatrie a bon dos. Car la folie des « fous d’Allah » est autant psychiatrique qu’idéologique. Cet individu était connu pour être très dangereux. Le ratage est à tous les niveaux.
Darmanin dit réfléchir à une rétention de sûreté pour les terroristes. Qu’en pensez-vous ?
Il faut impérativement des mesures d’exception pour les individus les plus dangereux. Mais la rétention de sûreté, à jurisprudence constante, serait sanctionnée par le Conseil constitutionnel. C’est la raison pour laquelle l’article 3 de notre proposition de loi constitutionnelle vise à créer un bouclier pour nous prémunir des dérives jurisprudentielles, lorsque nos intérêts fondamentaux sont en jeu. Mais sans attendre, je propose — et le Sénat l’a déjà votée – une mesure judiciaire de surveillance de sûreté qui permettrait d’astreindre les personnes condamnées pour terrorisme, et qui ont fini de purger leur peine, à des obligations d’injonction de soins, de placement sous bracelet électronique, de soumission à des mesures de contrôle, comme le pointage au commissariat, etc.
Darmanin fait le lien avec le projet de loi (PJL) Immigration en évoquant la « responsabilité immense » de ceux qui, en votant contre, empêcheraient d’expulser des « délinquants
étrangers radicalisés ». N’a-t-il pas raison ?
L’irresponsabilité, ce serait de faire voter un texte inutile. Il y a un double jeu chez Gérald Darmanin. Il ne peut pas dire, « en même temps », que le texte du Sénat et le texte de la commission des Lois de l’Assemblée lui conviennent tous les deux ! Car les députés macronistes et de gauche ont complètement détricoté le travail du Sénat : un tiers de la loi, soit 31 articles, a été supprimé. Dont la transformation de l’AME (aide médicale de l’État), le rétablissement du délit de séjour irrégulier ou le conditionnement des allocations familiales à cinq ans de présence légale sur le territoire. Par ailleurs, les députés ont rétabli la régularisation automatique des clandestins qui travaillent, et sont revenus sur les mesures de durcissement du regroupement familial ou d’acquisition de la nationalité. Les deux textes sont donc contradictoires. En l’état, le projet qui va être soumis aux députés ne permet plus de reprendre le contrôle de l’immigration. Ceux qui voteraient ce texte-là se rendraient complices de laxisme migratoire.
Est-ce à dire que vous appelez vos collègues LR à voter contre le texte en l’état ?
Évidemment. Mais j’appelle surtout les députés macronistes à se ressaisir et à reprendre les mesures de fermeté du Sénat. Il ne pourra y avoir de consensus avec le Sénat que sur une loi efficace, et non pas sur une énième loi inutile. Si les choses ne sont pas redressées en séance, il n’y aura pas d’accord en commission mixte paritaire.
Vous dites qu’il n’y aura aucun accord s’il n’y a pas de retour à la copie exacte du Sénat ?
L’essentiel du texte du Sénat doit être préservé. Ce n’est pas une seule mesure qui permettra de mettre fin au chaos migratoire, c’est la cohérence d’un ensemble. Nous voulons que ce texte soit utile. Et s’il l’est, alors nous le voterons. J’ai toujours considéré que, même dans l’opposition, nous devons être utiles aux Français.
Vous voulez une loi « utile », mais n’aviez-vous pas dit qu’une réforme constitutionnelle devait être un préalable à l’adoption d’une loi ordinaire ?
Nous n’avons jamais soumis le vote d’une loi ordinaire à la modification de la Constitution, mais nous avons toujours dit qu’il fallait les deux.
L’adoption de votre proposition de loi constitutionnelle est-elle un préalable à un accord sur le PJL Immigration ?
De toute façon, le président de la République a déjà fermé la porte à un référendum sur l’immigration. Je le regrette. C’est la preuve qu’Emmanuel Macron n’est pas prêt à une
rupture radicale sur le sujet.
En cas de 49.3, une motion de censure est-elle inévitable pour votre famille politique ?
Si le texte du Sénat n’était pas rétabli à l’Assemblée, il y aurait une légitimité à ce que LR dépose une motion de censure.
>> Lire l’interview sur LeParisien.fr
L’article Bruno Retailleau : « L’État ne parvient plus à protéger les Français » est apparu en premier sur les Républicains.