Brice Hortefeux : « Sans LR, rien ne peut se faire, avec LR, tout est ouvert »
Le député européen et ancien ministre plaide pour une révision de la Constitution. Condition sine qua non, selon lui, pour donner la parole aux Français sur l’immigration.
Le député européen LR et ancien ministre répond aux réserves émises par Gérald Darmanin dans Le Parisien, portant sur la proposition de loi constitutionnelle des Républicains.
« Chacun doit faire un pas », a répondu Gérald Darmanin aux Républicains. Sur la loi immigration, se dirige-t-on vers un accord entre le gouvernement et la droite ?
Ce qui importe, c’est la confrontation des projets. Celui qu’ont présenté Éric Ciotti, Bruno Retailleau et Olivier Marleix est tout à la fois complet, sérieux et efficace. Après en avoir pris connaissance, le ministre de l’Intérieur, et c’est naturel, continue de défendre le projet de loi du gouvernement en estimant qu’il pourrait être enrichi par nos propositions par le biais d’amendements. Je dis : attention. Car, aujourd’hui, nous savons que le « en-même-tempisme », c’est l’immobilisme. À vouloir courir deux lièvres à la fois, l’on finit par se perdre. Aussi, soyons clairs : sans LR, rien ne peut se faire, avec LR, tout est ouvert.
Le ministre de l’Intérieur vante son projet de loi sur l’immigration comme « le texte le plus ferme de ces vingt dernières années ».
Gérald Darmanin, en disant cela, nie une réalité : la droite, au pouvoir, a su prendre à bras-le-corps le sujet de l’immigration. En 2007, avec Nicolas Sarkozy, nous avons élaboré une nouvelle politique de l’immigration s’appuyant sur la création audacieuse du ministère de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire. Parallèlement, nous avons fait adopter au forceps un pacte européen interdisant les régularisations massives des sans-papiers : preuve qu’avec de la volonté, il est possible d’agir sans s’affranchir du cadre européen.
Enfin, nous avons engagé une véritable rupture avec les politiques menées précédemment en maîtrisant l’immigration familiale par l’obligation d’un logement adapté à la taille de la famille, des ressources d’un travail, du respect des valeurs de la République et de la connaissance de la langue française. Simultanément, nous avons stabilisé durablement l’immigration régulière. De 2007 à 2011, 110.000 illégaux ont été reconduits de gré ou de force, la moyenne annuelle du nombre de demandeurs d’asile est descendue à moins de 35.000, et enfin en 2012, 192.000 titres de séjour furent délivrés contre plus de 320.000, aujourd’hui. Nous avons agi fortement en bousculant les dogmes.
Mais depuis quinze ans, il est vrai que le monde et les migrations ont changé. À nouveau défi, nouvelle politique. Nous y répondons par nos deux propositions de loi, la première ordinaire et la seconde, constitutionnelle – celle qui permettrait d’organiser un référendum sur la question migratoire et de réduire effectivement et drastiquement les flux.
C’est précisément cette dernière que le ministre de l’Intérieur, sceptique, qualifie de « Frexit migratoire ». Que lui répondez-vous ?
Le « Frexit », c’est la sortie de l’Europe. Ce que nous proposons, ce n’est pas ça, c’est une dérogation aux traités et directives limitée et circonscrite à un point précis mais essentiel : le contrôle de flux migratoires. Ce, afin de permettre à la France de décider souverainement qui rentre durablement sur son territoire. Les Danois ont obtenu ces dérogations par la concertation. Pourquoi n’en serions-nous pas capables, auprès de Bruxelles ? Il n’y a là rien de violent. Le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État font eux-mêmes prévaloir des principes constitutionnels essentiels sur le droit communautaire et personne ne songerait à dire que nos deux juridictions suprêmes pratiquent un « Frexit » !
Ce que nous voulons dire, c’est que parmi nos principes constitutionnels essentiels, il y a aussi la capacité de l’État de contrôler et diminuer les flux migratoires. Qu’on ne nous dise pas non plus qu’une révision constitutionnelle sur un sujet comme l’immigration constituerait une remise en cause de nos propres principes. On l’a déjà fait en 1993, à l’initiative d’Édouard Balladur : une révision de la Constitution apportant une dérogation au droit d’asile du préambule de la Constitution a été adoptée. Ce, pour dispenser la France de l’obligation d’examiner les demandes d’asile déboutées par les États signataires des accords de Schengen. Donc pas de quoi pousser des cris d’orfraie…
Les Républicains peuvent-ils transiger sur leur proposition de loi constitutionnelle ?
La loi constitutionnelle est la clé de voûte des propositions de LR. Sauf à accepter de perpétuer l’impuissance. Le désordre migratoire s’est profondément accentué. Sur la dernière année connue, le gouvernement a fait délivrer 320.330 titres de séjour soit 57 % de plus que sous Nicolas Sarkozy. Les demandes d’asile ont explosé : 55.000 en 2012 contre 156.103 l’an dernier. Au total, c’est autour de 500.000 migrants qui rentrent chaque année sur notre territoire.
Si nous voulons véritablement reprendre la maîtrise des flux migratoires et décider concrètement qui peut venir sur notre territoire, nous devons adopter une révision constitutionnelle qui permettra de poser aux Français la vraie question : « Voulez-vous plus ou moins d’immigration en France ? » Or, cela est impossible aujourd’hui par la seule application de l’article 11 de notre Constitution. Osons réformer pour obtenir des résultats face à ce défi. Il est minuit moins cinq !
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