Laurent Wauquiez : « La loi zéro artificialisation nette est une folie »
Pour le président LR de la région Auvergne-Rhône-Alpes, la loi sur l’objectif zéro artificialisation nette des sols est un « contresens écologique » qui aggravera la crise du logement.
En septembre 2023, votre réaction contre le dispositif zéro artificialisation nette (ZAN) lors du congrès de l’Association des maires ruraux avait fait beaucoup de bruit. Ce qui motivait votre position est-il toujours d’actualité ?
Cette loi est l’archétype de la folie administrative qui s’est emparée de notre pays et dont chacun peut constater les dégâts. Elle aboutit à ce que des entrepreneurs ne pourront plus avancer, à ce que les Français vont subir encore plus de normes folles et à ce que des fonctionnaires vont décider à la place des élus où l’on a encore le droit de construire ou non. Elle met sur le même plan une maison insérée dans le paysage et une zone commerciale enlaidissant la périphérie de nos villages. Elle mène à des absurdités dont témoigne le décret d’application de fin 2023 : si vous possédez un jardin de plus de 2500 m², il sera considéré ou non comme artificialisé selon que sa « surface arborée » est inférieure ou supérieure à 25%… Il va donc falloir mesurer le pourcentage d’arbres des jardins ! À l’heure où de nombreux Français peinent à se loger, ce dispositif empêchera la création de nouveaux logements. Ce qui m’a frappé, c’est qu’au fond tout le monde restait silencieux car c’était une loi présentée sous couvert de bonnes intentions environnementales. Mais aucun pays au monde ne s’est imposé un tel sommet de bureaucratie kafkaïenne ! J’ai donc décidé de jeter un pavé dans la mare car le ZAN relève autant de la folie administrative que du contresens écologique.
Après des semaines de négociations entre l’État et les régions, quoi de nouveau sur ce dossier ?
On commence à mesurer les dégâts potentiels de cette loi. Des acteurs économiques alertent sur le danger que représentent ces normes pour leur activité, comme à Toulouse où le ZAN risque de bloquer les projets aéronautiques que l’Allemagne sera, elle, ravie d’accueillir. Des milliers d’élus de terrain ont relayé nos alertes. Et même au plus haut niveau de l’État, certains membres du gouvernement expliquent maintenant, plus ou moins à mots couverts, que cette loi est contraire à l’objectif de renaissance industrielle. Ce bras de fer a été payant pour Auvergne-Rhône-Alpes. Nous avons réussi à inscrire sur la liste des projets d’envergure nationale et européenne des projets aussi essentiels que celui d’Imerys dans l’Allier pour parvenir à fabriquer des batteries électriques sur notre sol, ou celui de Carbogen Amcis dans le Puy-de-Dôme pour assurer la production de médicaments en France. Je tiens à remercier le ministre Christophe Béchu qui fait ce qu’il peut avec une loi mauvaise. Mais au gouvernement, personne n’a le courage de faire machine arrière à ce stade et de revenir au bon sens.
Ne percevez-vous aucune avancée ?
Ma conviction est que cette loi est aussi néfaste pour les intérêts de la France que pour l’environnement, car elle repose sur une approche fondamentalement idéologique de l’écologie qui est en réalité celle de l’extrême gauche. Une écologie de l’interdiction plutôt que de l’incitation. Une écologie par les décrets plutôt que par les projets. Une écologie de la décroissance plutôt que de l’innovation. Je refuse cette approche et demande toujours une remise à plat totale de ce dispositif.
Quand le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires réclame de la souplesse du côté des services de l’État, considérez-vous cette intention comme une sécurité pour les collectivités ?
C’est surtout révélateur du terrain qu’abandonne la politique à l’administration. Nous avons une loi dont tout le monde s’aperçoit qu’elle est mauvaise mais que personne n’ose changer. Les ministres en sont réduits à demander à leur administration de ne pas appliquer une loi pour en limiter les effets. Et si la solution était plus simple ? Changeons la loi.
Vous continuez de croire aux conséquences « catastrophiques » d’un dispositif censé protéger la biodiversité en limitant et en compensant l’artificialisation des sols. Quelles conséquences anticipez-vous ?
En matière d’écologie, quelle est notre spécialité nationale ? Nous imposer des contraintes et des normes que nous n’appliquons pas à nos concurrents étrangers et pas aux produits importés. Quelles en sont les conséquences ? Nous détruisons nos emplois et notre industrie et nous importons des produits fabriqués dans des conditions environnementales catastrophiques. Bilan pour l’emploi : négatif. Bilan pour l’environnement : négatif. C’est en cela que cette loi est un contresens écologique. Notre industrie comme notre agriculture sont parmi les plus vertueuses au monde. Ma région en est un exemple puisque nous sommes tout à la fois le moteur industriel de la France et la région numéro un pour la production d’énergies décarbonées. Alors que nous devrions innover et relocaliser, on nous impose toujours des contraintes supplémentaires. Un autre chemin est possible : celui du patriotisme environnemental.
Que proposez-vous comme solutions alternatives pour faire face aux échéances fixées par les plans climat à l’échelle mondiale ?
Dans notre pays, pour préserver l’environnement, il faut avant tout produire en France. C’est pour moi un formidable message d’espoir pour notre jeunesse. Il n’y a pas à choisir entre soutenir nos emplois, nos entreprises, nos agriculteurs et protéger l’environnement. Rappelons quelques vérités : l’Allemagne émet deux fois plus de CO2 que la France et la Chine trois fois plus que l’Europe. Nous avons une des économies développées les plus décarbonées au monde et n’avons aucune raison de nous autoflageller. Sortons de cette idéologie imposée par l’extrême gauche. La réalité est que la majorité de notre empreinte carbone provient de nos importations.
La question environnementale semble absente des débats dans cette campagne des européennes. Qu’en pensez-vous ?
Sur ce sujet comme sur les autres, la seule liste de droite crédible est celle menée par François-Xavier Bellamy. Il a défendu avec constance le nucléaire quand les députés Renaissance joignaient leurs voix à la gauche pour s’y opposer. Il n’a jamais dévié contrairement au RN qui, sur des sujets aussi essentiels que notre monnaie, la PAC ou le nucléaire, change d’avis au gré du vent. Il est le seul qui propose à l’échelle européenne une vision de l’écologie positive, enracinée dans nos terroirs, favorable à notre industrie et notre agriculture pour ne pas dépendre des importations polluantes. C’est donc une raison de plus de mon soutien à la liste de François-Xavier Bellamy.
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