Brigitte Barèges : « Emmanuel Macron n’a jamais été élu local, il a peur de nous »
Chaque lundi, Valeurs actuelles interviewe une personnalité politique de premier plan. Cette semaine, la maire de Montauban Brigitte Barèges revient sur la lettre envoyée à la Première ministre, cosignée notamment par Robert Ménard, qu’elle nous dévoile en exclusivité. Son inquiétude : de nouvelles restrictions qui dépossèdent un peu plus les maires de leur capacité de construire, alors que vient la crise du logement.
La semaine dernière s’est tenu à Paris le traditionnel congrès des maires. Parmi vos préoccupations, le dispositif Zéro artificialisation net (ZAN), qui vous entrave pour construire, alors que l’on manque déjà de logements. Vous avez adressé un courrier à la Première ministre…
A partir de 2050, nous ne pourrons plus construire qu’à la verticale. Vous voyez des immeubles de cinq étages dans des villages ? C’est un truc de techno, dogmatique, vu de Paris, qui part d’un principe que l’on peut entendre : la sobriété foncière. Nous ne sommes pas contre, d’ailleurs je « renature » partout où je le peux en ville. Mais ce ZAN est irréalisable. Il nous faut forcément construire lorsqu’on accueille de nouveaux habitants. L’État est schizophrénique, car il nous demande de construire plus de logements sociaux dans le même temps, sous peine d’amende. Grâce au plan Borloo, à Montauban, nous avions fait tombé des tours délabrées de 15 étages, devenues invivables. Alors qu’on a bénéficié de millions d’euros de l’État pour faire de l’étalement urbain et construire des pavillons, il faudrait revenir en arrière ? De plus, certains grands projets, comme la ligne à grande vitesse entre Bordeaux et Toulouse pourraient être impactés. Il a été décidé en haut lieu de faire des listes de projets d’envergure nationale qui pourraient être exemptés des futurs droits à construire, mais elle reste floue. D’ailleurs, le préfet et la présidente de région en ont fait remonté deux différentes à l’État. Le risque, c’est que les communes se disputent les hectares à se répartir. Comme Laurent Wauquiez dans la région Auvergne-Rhône-Alpes, nous demandons à Élisabeth Borne, avec plusieurs maires d’Occitanie, de faire une pause, le temps d’y voir plus clair.
La décentralisation, tant attendue par les maires, est un vrai serpent de mer. Emmanuel Macron a encore réitéré son intention de la concrétiser. Y croyez-vous encore ?
Je suis pour un État fort, qui, comme à l’époque des Trente Glorieuses, construise les grandes infrastructures, les routes, les barrages… Aujourd’hui, on nous met sous tutelle et on nous prive de nos moyens d’action, tels que la fiscalité, qui était notre seul levier. On nous impose des lois environnementales complètement farfelues, on ne peut pas faire un projet sans des autorisations draconiennes au préalable, on est muselés par les services de l’État. Comme le dit David Lisnard, le président de l’Association des maires de France, l’État n’est plus en mesure de contrôler a posteriori, donc il nous entrave a priori. J’aimerais que l’État soit aux manettes pour fixer le cap, et que les maires, et non les régions, aient les moyens de leur indépendance. Car je vois bien, dans ma ville de droite, qu’il peut parfois être difficile d’obtenir des subventions de la région qui est à gauche. Emmanuel Macron n’a jamais été élu local, on dirait même qu’il a peur de nous. Il n’a pas de vision, il ne connait pas le peuple, manque cruellement d’ancrage et navigue à vue. Il manque aussi de courage, on le voit par rapport à Israël. Il faut nommer les choses. A Montauban, je ne me suis pas posé la question longtemps de savoir s’il fallait ou non aller marcher contre l’antisémitisme.
La ministre des Collectivités territoriales, Dominique Faure, annonce la mise en place d’un numéro vert pour les élus victimes d’agressions… Gadget ?
Cela me fait vraiment rire. Je suis en train de me faire agresser, allô, où est mon numéro vert ? Cela manque vraiment de sérieux.
Dans un classement réalisé par Valeurs actuelles l’été dernier, Montauban apparait la 16ème ville la plus sûre de France, alors qu’elle était réputée, à la fin des années 90, pour être particulièrement mal famée. Quelle est votre recette ?
J’ai été élue dans une ville de gauche sur le thème de la sécurité. Le maire, qui était un socialiste bon teint, considérait que la sécurité était uniquement du ressort de l’État. Il y avait des attaques à la voiture bélier dans les magasins, une émeute urbaine qui avait duré trois jours sans que les CRS ne sachent l’endiguer… Mon mode d’emploi a été celui de Jean-François Copé à Meaux. J’ai créé une vraie police municipale, qui ne soit pas des gardes champêtre, que j’ai armée dès 2002, avec de la vidéosurveillance partout. Il y avait des quartiers ghettos d’immigrés que nous avons cassés pour pacifier, avec aussi des moyens sur la prévention, de la médiation dans les collèges, un conseil des droits et devoirs des familles. J’aimerais aussi que l’on puisse priver les familles de mineurs délinquants d’allocations familiales.
Néanmoins, Montauban a été particulièrement touchée par les émeutes de juin dernier…
Nous n’avons pas le droit d’intervenir sur le maintien de l’ordre. Mais j’avais rappelé tous les effectifs de police municipale possibles, dont certains étaient en congés. Je me souviens d’un soir où nous avions une vingtaine d’agents, quand la police nationale en avait trois. Les émeutiers, certains avaient quinze ans, ont commencé à saccager les vitrines des commerces et les caméras de surveillance. Quand ils se sont attaqués à la médiathèque, j’ai dit au préfet : « cette fois on y va ».
Avez-vous vu la couleur de cette « réponse aux émeutes », promise par le gouvernement ?
Cela commence évidemment par arrêter les flots migratoires, rebâtir l’école, apprendre les valeurs, faire en sorte que les enfants des familles déficientes soient bien pris en charge… Le mal est très profond. Il faut tout reprendre à zéro, réinstaller l’autorité. Le respect du maire, c’est comme celui du professeur, du policier ou du juge.
La loi immigration, qui sera soumise aux députés cette semaine, doit-elle être votée par LR en l’état, dans la mesure où les jurisprudences européennes, même pas remises en question, ne changeront fondamentalement rien à la situation ?
Si l’article 3 sur la régularisation des travailleurs sans papier est maintenu, non. Il faut un référendum. Donnons la parole au peuple et récupérons notre souveraineté. C’est la meilleure solution.
Quel bilan tirez-vous de la première année de présidence des Républicains par Éric Ciotti ?
J’ai voté pour Éric Ciotti car je sais qu’il est le plus solide. Il a remis de l’ordre dans la maison avec des moyens limités, car ce n’est plus la grande époque, il y a moins de militants et d’argent. Malheureusement, nous sommes débordés par la droite avec Reconquête et le Rassemblement National. Les européennes seront un moment de vérité. J’ai la culture du chef, il faudrait trouver l’homme providentiel. J’ai des regrets quand j’écoute Philippe de Villiers. Quelqu’un de cette trempe…
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