Stéphane Le Rudulier : « Marseille est l’otage des cartels, il faut un état d’urgence contre la drogue »
Le sénateur des Bouches-du-Rhône décrit une situation de plus en plus intenable dans la Cité phocéenne où se multiplient les règlements de comptes.
Aujourd’hui, vous sonnez à nouveau l’alarme. Désespérez-vous de la situation à Marseille ?
En dix ans, la guerre des cartels a fait 300 morts. Il y a urgence, Marseille est l’otage des cartels et peut se transformer en Medellin, la Kalachnikov a remplacé Marianne sur fond d’enclave islamiste dans de nombreux quartiers. Il faut mener une guerre totale contre ce fléau !
En réponse, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a annoncé 300 policiers supplémentaires et 3 nouvelles compagnies de CRS. Est-ce suffisant ?
Mais Gérald Darmanin peut continuer à fournir le meilleur travail possible, sans reconstitution de l’effectivité de la chaîne pénale, il est condamné à vider les cités des narcos à la petite cuillère percée. Par manque de places de prison, la France incarcère moins que ses voisins : 105 incarcérés pour 100.000 habitants contre 138 au Royaume-Uni. Résultat, seulement 59 % des individus condamnés à une peine de prison ferme vont en cellule ! Parmi eux, des milliers de trafiquants de drogue. C’est un message d’impunité absolu envoyé par l’État aux cartels. Il faut une révolution pénale mais aussi un arsenal répressif renforcé comme jamais ! Des solutions existent.
Lesquelles ?
Un dealer pris en flagrant délit ne va presque jamais en prison. Il y a un sentiment d’impunité réel. Il faut restaurer le sens et l’effectivité de la peine en construisant des milliers de places de prison. Il faut un état d’urgence contre la drogue. J’appelle à un régime d’exécution des peines d’exception pour les trafics de drogue. Il faut durcir les peines des trafiquants. Les têtes de réseaux doivent écoper de peines exemplaires et planchers, 30 ans incompressibles. Quant aux petites mains, elles doivent écoper de fortes peines, là aussi incompressibles et automatiques, 5 ans minimum. Il faut que la peur change de camp. Un trafiquant arrêté doit avoir la certitude de finir derrière les barreaux, et pour longtemps! Il ne doit pouvoir bénéficier d’aucune remise de peine. De plus, je demande à ce que, une fois la peine purgée, ils ne puissent plus revenir sur le territoire de leur trafic. Il faut leur interdire un périmètre assez large pour empêcher toute reconstitution des réseaux. Il faut les bannir des quartiers et des villes où ils sévissent, nettoyer Marseille des narcos.
Enfin, il est primordial d’expulser des logements sociaux les trafiquants et leurs familles lorsqu’ils sont mineurs, et de couper les aides sociales dont ils bénéficient. Il faut responsabiliser les familles et les habitants des quartiers. Un point de deal, c’est entre 80.000 et 130.000 euros par jour. Il y a des quartiers entiers qui en bénéficient. Le trafic ruisselle en milliers d’euros dans des immeubles et familles. Il faut casser le ruissellement de l’argent de la drogue et du crime.
Faut-il, comme le soutient Éric Ciotti, « placarder le nom » des personnes arrêtées en possession de stupéfiants ?
Oui, évidemment! Toute idée pour responsabiliser le consommateur est bonne mais il faut avant tout augmenter massivement l’amende forfaitaire. Les consommateurs doivent comprendre la gravité de leur geste, il faut les mettre face à leurs responsabilités. Par leur consommation, ils financent le terrorisme et le crime. Ils ont indirectement du sang sur les mains. L’amende forfaitaire pour un consommateur s’élève à 200 euros. C’est loin d’être dissuasif. L’amende devrait être au minimum à 1000 euros. En cas de récidive, le consommateur doit être considéré comme malade d’une addiction et ainsi être soumis à une obligation de soins. En trente ans, le nombre de consommateurs a explosé. En 1992, 7 % des Français avaient consommé au moins une fois du cannabis, contre 45 % en 2020. C’est vertigineux. Il faut cesser de banaliser la consommation de drogues et entamer une grande campagne nationale de prévention, comme nous le faisons contre l’alcool au volant. Il n’y a jamais eu une guerre nationale contre la drogue en France, comme l’ont menée Reagan ou Clinton outre-Atlantique. Les jeunes doivent être soumis à un dépistage obligatoire régulier dès la seconde, dans tous les lycées de France.
Vous estimez par ailleurs la municipalité marseillaise coupable d’inaction.
La municipalité de gauche de Benoit Payan a une lourde responsabilité. Elle ferme les yeux. Il y a trop peu de vidéoprotection. À titre de comparaison, il y a 18 caméras pour 10.000 habitants à Marseille contre 72 à Nice. À Aix-en-Provence, à quelques kilomètres de là, il y a deux fois plus de caméras qu’à Marseille. Ce sous-équipement met en danger les Marseillais. En France, des personnalités courageuses, comme Bruno Retailleau, Gérald Darmanin ou Éric Ciotti, dénoncent l’inaction des grandes villes de gauche face à l’insécurité. Mais Marseille est la plus en danger ! 68 % des Marseillais se déclarent mécontents de l’insécurité dans leur ville. Deux Marseillais sur trois sont en colère contre leur maire sur ce sujet. Aujourd’hui, cette insécurité se paie en vies humaines. Alors que le ministre de l’Intérieur envoie de nouvelles unités de CRS, la municipalité veut ouvrir une salle de shoot près de la gare Saint-Charles. Le signal envoyé est dramatique : le maire est indirectement du côté des trafiquants de drogue. Depuis le départ de Jean-Claude Gaudin (LR), au bilan bien plus positif que son successeur, la situation s’aggrave et risque d’atteindre un point de non-retour. La mobilisation remarquable de Martine Vassal avec le département et la métropole, de Renaud Muselier à la région, va être capitale dans les prochains mois pour empêcher le pire. Les municipales de 2026 seront sans doute l’élection de la dernière chance pour Marseille.
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