Jean Leonetti : « Face aux migrants, j’ai l’impression que l’État navigue à vue »
Après la réquisition d’un hôtel à Antibes pour loger de jeunes migrants, le maire fustige les défaillances de l’État.
Comment l’obligation d’héberger des mineurs migrants (MNA) dans un hôtel d’Antibes vous a-t-elle été annoncée ?
Cette mesure concernant 28 jeunes mineurs m’a été présentée mardi soir pour le lendemain. On parle souvent du couple maire-préfet mais le maire ici s’est retrouvé au pied du mur, sans concertation. Une fois de plus, l’État, défaillant dans ses missions régalienne et humanitaire, se décharge sur les collectivités. Je me suis mis en rapport immédiatement avec Charles-Ange Ginésy, président du conseil départemental en charge de l’aide à l’enfance sans être pour autant responsable de l’accueil des migrants. Ces mineurs sont donc hébergés dans un appart-hôtel situé dans une zone commerciale d’Antibes, réquisitionné parce qu’il est en partie vide durant l’hiver. Le département assume l’accompagnement. J’ai demandé à des associations de se conventionner avec la collectivité pour les accompagner.
Quels moyens municipaux mobilisez-vous ?
On ne peut pas laisser des jeunes de 15 à 18 ans dans un espace confiné. Nous devons être attentifs à leur capacité d’insertion car s’ils étaient livrés à eux-mêmes sans moyens, ils risqueraient de sombrer dans la délinquance. Nous rassurons aussi la population. Le maire ne peut rien faire d’autre que de mobiliser ses services sociaux et sa police municipale.
Le préfet a-t-il précisé la durée de cet hébergement d’urgence ?
Non. Avec franchise, il m’a dit que compte tenu des flux permanents existants, la situation pourrait devenir pérenne. Puisqu’il n’y a pas de solution alternative, ni de vision prospective des stratégies, nous risquons d’être de plus en plus débordés.
Savez-vous pourquoi Antibes a été choisie par les services de l’État ?
Non. C’est l’opacité totale. Il y avait 28 places à trouver. Mais j’ai le sentiment que l’État navigue à vue.
Quelle est la situation dans les Alpes-Maritimes ?
Il y avait moins de 200 mineurs non accompagnés sur notre territoire il y a dix ans, contre près de 5000 enregistrés sur une année aujourd’hui. Actuellement 700 jeunes sont hébergés sur l’ensemble du département car un certain nombre ont été placés ailleurs et d’autres ont fugué. On observe une accélération très forte de ce phénomène migratoire. La hausse représente 40 %. C’est pour cela que toutes nos capacités d’accueil débordent. Évidemment, c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase car le département sonne l’alerte depuis longtemps. En réalité, notre département frontalier, proche de l’Italie, n’est pas le seul touché. Nos frontières sont des passoires et l’État n’a pas les moyens d’y faire face. C’est un constat. Cette immigration, essentiellement économique, ne se tarira pas si l’on ne prend pas des mesures pour contrôler nos frontières.
Le gouvernement annonce un projet de loi sur l’immigration. Qu’en attendez-vous ?
Les lois ne sont pas respectées et l’on observe une sorte de renoncement de l’État à les mettre en œuvre. J’entends bien ce que dit le ministre de l’Intérieur sur la fermeté mais les actes ne sont pas en rapport avec les paroles. À mon sens, deux pays mériteraient notre attention : le Canada qui a mis en place un pacte, un parcours d’intégration efficace et le Danemark qui a réussi à diminuer son immigration de 40 %. Soit on reste dans la fatalité, soit on se décide à fixer des règles. Le ministre Darmanin propose de régulariser les gens qui travaillent dans les métiers en tension mais c’est une porte ouverte à la régularisation abusive des clandestins. Ce n’est pas la bonne voie. Le divorce permanent entre la loi et la réalité fait que ce gouvernement perd aujourd’hui toute crédibilité.
Concernant la fin de vie, une loi autorisant l’aide active à mourir pourrait-elle voir le jour en France avant la fin du quinquennat ?
En tout cas si c’est une intention du gouvernement – ce que je crois – il devrait le dire clairement. Si l’on veut aider les gens qui vont mourir en France, il faut d’abord donner des moyens aux 26 départements qui n’ont toujours pas de soins palliatifs.
Éric Ciotti vous demande de préparer une fondation LR. Quel est votre cahier des charges ?
Les Républicains doivent être en phase avec les attentes de nos concitoyens. La mission d’un parti politique est de porter un projet de société, une vision pour la France et un chemin d’espérance. Tout en conservant nos valeurs immuables, nous devons accepter les changements du monde et produire des idées nouvelles. C’est tout l’ambition de cette mission.
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