Eric Ciotti : « Si Borne écoute nos propositions, le 49.3 ne sera pas nécessaire »
Le président du parti de droite Les Républicains estime qu’il y a encore des « avancées à obtenir » sur le texte du gouvernement, notamment sur la question des carrières longues.
A la vieille de l’examen de la réforme des retraites à l’Assemblée nationale, le président du parti les Républicains et député des Alpes-Maritimes, Éric Ciotti, affirme que si le gouvernement répond aux demandes de la droite, « une très large majorité dans le groupe LR » votera le texte.
Les Républicains peuvent-ils encore refuser de voter la réforme des retraites ?
J’ai toujours dit que je souhaitais voter une réforme des retraites, parce qu’elle est nécessaire et parce que nous devons être responsables pour l’intérêt du pays. Nous avons d’ores et déjà obtenu des avancées très importantes vers une plus grande justice. La pente très brutale de la réforme a été atténuée en passant de 65 à 64 ans. Nous avons obtenu la revalorisation des petites retraites à 1200 € brut pour une carrière complète. Mais il reste des avancées supplémentaires à obtenir, indispensables pour l’équilibre et la justice du texte.
De quelles avancées parlez-vous ?
Je pense en particulier à la question des carrières longues. Beaucoup de Français mais aussi de responsables syndicaux ont relevé que, dans cette réforme, ce sont ceux qui ont commencé à travailler le plus tôt qui devaient cotiser le plus longtemps. Nous avons donc indiqué que ceux qui s’inscrivent dans ce cadre, ayant commencé avant 21 ans, pourront partir à la retraite après 43 annuités, avant l’âge de départ légal. C’est pour cela que je suis allé voir la Première ministre avec le président du groupe LR, Olivier Marleix, mercredi. Je suis très confiant en notre capacité à obtenir satisfaction sur ce point essentiel. Il faut aussi répondre au défi majeur de l’évolution démographique, qui, à terme, constitue la première source de déséquilibre du régime des retraites. Dans cet esprit, il faut renouer avec une grande politique familiale pour le pays, mise à mal par M. Hollande et M. Macron. Depuis 2012, il y a 100 000 naissances de moins par an, ce qui fera 100 000 cotisants de moins dans les années 2040. Nous voulons aussi favoriser l’emploi des seniors, ce sera un puissant moteur pour valoriser le travail. Je ne supporte plus ce « travail bashing » propagé par l’extrême gauche. Le travail est une valeur noble qui doit être sauvegardée.
Comment ?
Il faut, comme le proposent François Asselin et la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), baisser les cotisations pour les emplois des seniors.
Est-ce que ce sont des conditions sine qua non de votre vote ?
Je ne fonctionne pas par oukase. Ce qui me guide, c’est la cohérence et la responsabilité. Si nous ne faisons rien, il n’y aura pas d’autre choix que devoir baisser drastiquement les retraites ou de voir augmenter fortement les cotisations. Et je m’y refuse.
La question des carrières longues a été un sujet central à LR. Si le gouvernement vous donne satisfaction là-dessus, est-ce que cela suffira pour voter la réforme ?
Cela permettra d’emporter une très large majorité dans le groupe LR.
Vous pointez le projet du gouvernement, qui souhaitait repousser l’âge légal de départ à 65 ans. Pourtant, lors de la campagne interne à LR, cet automne, vous défendiez la possibilité d’aller à 65 ans ou de cotiser 45 annuités. N’est-ce pas hypocrite ?
Si nous en sommes là, nous le devons aux procrastinations de M. Macron depuis six ans. Une réforme claire adoptée en 2017 aurait été mieux acceptée. Aujourd’hui, cette réforme s’inscrit dans un contexte de difficultés pour les Français avec une succession de crises. 45 ans aurait permis de rendre plus rapide le retour à l’équilibre, mais j’entends l’inquiétude et la colère de nos concitoyens. Chacun doit prendre en compte une situation qui est nouvelle, tout en restant attachée au principe de la réforme.
Élisabeth Borne envisage de prendre des sanctions contre les entreprises qui n’auraient pas de plan d’action pour encourager l’emploi des seniors. Y êtes-vous favorable ?
Non, les sanctions n’ont jamais démontré leur efficacité. Il faut faire confiance aux entreprises et les inciter à améliorer l’emploi des seniors. Je propose une grande conférence tripartite État-responsables syndicaux-responsables patronaux pour définir le cadre d’une grande politique de relance de l’emploi des seniors.
Certains députés LR estiment que ce n’est pas le bon moment pour faire une telle réforme. Que leur dites-vous ?
Notre famille politique n’est pas une caserne, je respecte toutes les positions de mes collègues. Mais, pour moi, la cohérence avec ce que nous avons toujours défendu doit nous amener à faire des choix courageux, conformes à l’intérêt supérieur du pays. Et ce, quelle que soit l’impopularité que l’on pourrait en subir.
Si le gouvernement devait passer par un 49.3 pour faire adopter le texte, que feriez-vous ? Voteriez-vous une éventuelle motion de censure ?
Si Élisabeth Borne sait écouter les propositions pertinentes que nous faisons, le recours au 49.3 ne sera pas nécessaire.
« Le chef, c’est celui qui est candidat à l’élection présidentielle », a déclaré Aurélien Pradié, votre numéro deux bis. Ce n’est pas vous le chef de LR, Éric Ciotti ?
Il y a eu un résultat clair lors de nos élections internes. J’entends faire respecter le choix des militants. Moi, ce que je souhaite, c’est que nous ayons tous un jeu collectif. Je ne crois pas au succès des entreprises individuelles en politique, surtout dans la situation difficile que nous rencontrons depuis la présidentielle.
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