Éric Ciotti : « Je m’opposerai à toute forme de primaires pour l’avenir »
Candidat à la présidence des Républicains, Éric Ciotti s’opposera, s’il est élu, « à toute forme de primaires ».
Vous président de LR, quelles seraient vos premières décisions ?
Notre candidat à la présidentielle de 2027 sera désigné très rapidement. Ça sera la première des mes priorités. Ce qui a considérablement affaibli la droite depuis 2012, c’est l’absence d’un chef reconnu et incontesté à sa tête. Pour pallier ce manque, nous avons été contraints, par deux fois, à recourir à des primaires qui nous ont conduits à deux échecs cuisants en 2017 et 2022. Je le dis clairement : je m’opposerai à toute forme de primaires pour l’avenir. Face à Emmanuel Macron, Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon, les LR doivent retrouver une voix et un visage.
Et ensuite ?
Ma seconde priorité sera de refonder un cadre idéologique solide, synthèse entre l’attente de sécurité et l’exigence de liberté. Chaque année, la France gagne la coupe du monde et d’Europe des impôts. C’est devenu insupportable. La droite doit y mettre un terme. Ma priorité sera de proposer un puissant contre-choc fiscal. Je souhaite ramener les prélèvements obligatoires a minima à moins de 40 % du PIB, ce qui signifie une baisse de la fiscalité et des charges d’au moins 125 milliards d’euros sur un quinquennat. Cela permettra d’augmenter des salaires qui ne valorisent plus suffisamment le travail face à l’assistanat. Mon objectif sera de réanimer le parti sur ses convictions, mais aussi sur ses méthodes. Je veux mettre au service de notre futur candidat un parti qui déborde d’idées, en se saisissant de sujets où nous avons été trop longtemps inaudibles. En particulier la transition environnementale, l’éducation, le logement ou l’égalité entre les femmes et les hommes.
Qui serait le meilleur candidat de la droite à la présidentielle de 2027 ?
Une personnalité dispose des meilleures qualités pour incarner l’avenir de la droite : Laurent Wauquiez. Il est le mieux placé. Depuis 2007, nous avons vécu à l’ombre de trois grandes figures tutélaires : Nicolas Sarkozy, François Fillon, Alain Juppé. Ils ont tous renoncé à une ambition politique nationale. D’autres ont essayé d’incarner une relève : Xavier Bertrand et Valérie Pécresse. Ils n’y sont pas parvenus. Dans son territoire, Laurent Wauquiez connaît une extraordinaire réussite. Si la France était à l’image de la Région Auvergne-Rhône-Alpes et du département des Alpes-Maritimes, les LR auraient la majorité absolue à l’Assemblée nationale ! Laurent Wauquiez a développé des politiques très novatrices tout en gérant remarquablement l’argent public. Il porte une vision courageuse de la France et de son avenir.
Quel agenda suggérez-vous ?
Il faudra aller vite, dès le début de 2023. Désigner notre candidat quatre mois avant l’élection présidentielle est beaucoup trop tardif pour mûrir longuement un véritable projet novateur et rassembleur. D’autant que ce projet devra s’inscrire en rupture totale avec ce qui est fait en France depuis des décennies.
À droite et au centre, beaucoup redoutent une droitisation extrême ou une extrême droitisation du parti si vous le dirigez. Que leur répondez-vous ?
Je suis étonné par cette analyse alors que toutes les études démontrent que le pays n’a jamais autant été à droite… Ce n’est certainement pas dans cet instant qu’il faut renoncer à nos convictions. Je suis de droite, j’en suis fier et ne m’en excuserai jamais. Je suis profondément gaulliste, guidé par mon grand-père prisonnier de guerre et mon oncle résistant. J’ai adhéré au RPR à l’âge de 16 ans et je n’ai appartenu qu’à une seule famille politique. Je ne viens pas d’ailleurs et je n’irai pas ailleurs.
Si vous gagnez, ne craignez-vous pas une scission des Républicains ?
Le vrai danger, c’est la disparition. Nous sommes passés de 32 % à l’élection présidentielle de 2007 à moins de 5 % d’électeurs à celle de 2022. Près de 90 % de ceux qui avaient voté pour Nicolas Sarkozy nous ont déjà quittés. Mon but sera d’aller rechercher un par un ces électeurs, autant du côté d’Emmanuel Macron que du côté de Marine Le Pen. Il ne s’agit pas de rafistoler une boutique qui prend l’eau de toute part, mais de reconstruire un édifice moderne, fort de nos racines et de nos valeurs.
Le « tout sauf Ciotti » vous inquiète-t-il ?
J’entends cette musique. J’y perçois une forme de mépris qui, je le sais, choque nos militants. Cette partition avait déjà été jouée lors du congrès. On voit hélas où cela nous a menés. Ce débat mérite d’être conduit dans le respect de chacun. Soit nous avons le courage d’explorer des chemins plus audacieux, soit nous serons effacés. Je ne serai pas le candidat du statu quo, de la prudence, du conservatisme.
Quatre candidats, ce n’est pas trop pour un parti qui voit ses adhérents partir ?
Plus nous aurons des débats riches et sincères, mieux ce sera.
Sur les textes concernant le pouvoir d’achat, les Républicains n’ont pas été dans l’opposition frontale au gouvernement. Quel est le bon positionnement ?
Pour moi, le macronisme est un naufrage. Le tribunal de l’histoire jugera très sévèrement l’inaction coupable d’Emmanuel Macron. Je prône une ligne d’opposition claire et forte. Toute forme de participation ou d’alliance avec ce pouvoir est à récuser. C’est cette ligne que les militants devront également valider en m’élisant à leur tête en décembre.
Cette stratégie ne risque-t-elle pas de mener au blocage des institutions ?
Je dresse un constat très sévère de dix années de macronisme. Je parle bien de dix années car pour moi, les politiques de François Hollande et d’Emmanuel Macron sont quasi identiques. Les choix catastrophiques effectués en matière d’énergie – qui sont à la base du futur rationnement électrique – appartiennent solidairement à messieurs Hollande et Macron. Il en est de même sur le terrain migratoire, ou encore budgétaire avec cette gabegie permanente qui a fait exploser notre endettement. La devanture a été rafistolée, mais l’arrière-boutique reste similaire. Je ne serai jamais complaisant avec un pouvoir qui a autant accéléré le déclin de la France. Nous rouvrons des centrales à charbon tout en demandant des efforts aux Français alors qu’on a fermé Fessenheim. Quel paradoxe ! Sur l’islamisme, la fuite de l’imam Iquioussen – dont semble se satisfaire Gérald Darmanin qui, comme à son accoutumée, fait de la com – est révélatrice du fiasco d’une politique qui a refusé de rétablir le délit de séjour illégal, et qui a érigé le placement en centre de rétention en procédure systématique avant toute expulsion.
Avec cette opposition radicale, le pays ne risque-t-il pas la paralysie ?
L’inaction du pouvoir en place a conduit à la montée d’un danger politique majeur : un duel entre Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen à la prochaine présidentielle. Je ne veux pas de ce scénario. Je m’opposerai aux menaces qu’incarnent Mélenchon et sa clique qui voudraient transformer notre pays en nouveau Venezuela. Mais n’oublions jamais que les premiers responsables de cette situation. Ce sont M. Macron et tous ceux qui prétendent à son héritage : Bruno Le Maire, Édouard Philippe, Gérald Darmanin. Comment Édouard Philippe, qui a signé le décret de fermeture de Fessenheim, peut-il aujourd’hui nous donner des leçons ?
Voterez-vous le prochain budget ?
Non ! Voter un budget veut dire participer et se fondre dans la majorité macroniste. Voter celui-ci en particulier reviendrait à endosser les erreurs en matière de politique énergétique, les fautes budgétaires et l’incurie migratoire et sécuritaire du pouvoir en place. Pour autant, nous ne jouerons jamais la politique du pire car nous privilégierons toujours l’intérêt général du pays.
Comme Jean-Luc Mélenchon , souhaitez-vous une dissolution de l’Assemblée nationale ?
Je ne crois pas en cette hypothèse. Cette décision n’appartient qu’au président de la République. S’il utilise cette arme, il devra mettre en jeu sa responsabilité et partir en cas de défaite.
N’est-il pas temps de faire un inventaire de la campagne de Valérie Pécresse ?
Bien sûr, mais ce sont malheureusement les Français qui l’ont fait, de façon sévère. Notre message n’a pas été compris car il n’était peut-être pas suffisamment clair et audacieux.
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